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Sheela - Page 3

  • La rencontre (PART V et FIN)

    - Ne me faites pas de mal !

    - Pourquoi vous ferais-je du mal ?

    - Vous êtes une personne dangereuse, je le sais. Une personne incontrôlable.

    - Alors pourquoi m’avez-vous délivré ?

    - Parce que je ne voulais pas que vous mutiez.

    - Que je mute ? Que voulez-vous dire par muter?

    - Ils allaient se livrer à des expériences sur vous.

    - Des expériences ?

    - Ce matin, ils devaient vous emmener au labo et vous injecter un produit expérimental.

    - Qui ça « ils » ?

    - L’équipe de recherche expérimentale.

    - Je ne comprends rien à cette histoire. Et puis qui êtes-vous ?

    - Je suis Vass.

    - Vous n’êtes pas Vass. Vous vous appelez Vassilia. Nous nous sommes déjà rencontrés, il n’y a pas très longtemps, dans un café. Vous vous souvenez ?

    - Non, je ne vois pas de quoi vous parlez. Je ne connais pas cette Vassilia. Je travaille ici comme laborantine.

    - Mais où suis-je donc ?

    - Vous êtes à la Clinique Psychiatrique Château du Grand Air.

    - Comment suis-je arrivé là ?

    - Je ne sais pas si je peux vous le dire.

    - Comment ça? Arrêtez vos mystères !

    - Vous n’avez pas d’existence légale.

    - Que voulez-vous dire ?

    - ...

    - Expliquez-vous !

    - Je ne peux vous en dire plus. Vous êtes entré par erreur dans la clinique. Vous n’étiez pas prévu dans le programme. Il fallait vous faire disparaître. C’est pour cela que vous avez été choisi comme cobaye pour des expériences scientifiques.

    - Quel genre d'expériences?

    - Je vous l'ai dit, une mutation génétique.

    - A quelle fin ?

    - Je ne sais pas, mais les objectifs ne doivent pas être très avouables.

    - Et qu'est-ce qui...

    - Chut ! Cessez de me poser des questions. Il faut songer à fuir maintenant et à sortir d'ici. Nos destins sont liés à présent.

     

      Une onde de ravissement brûle mon visage. La perspective de suivre cette femme, de s’échapper avec elle, de croire que notre survie dépende l’un de l’autre m’enchante. D’un regard direct je la dévisage, peut-être même je l’envisage déjà. A cette idée, un sourire se dessine sur mes lèvres. Il est temps de partir avant qu’ils ne nous retrouvent.

    - Oui, vous avez raison, et je me sens obligé de rajouter : Filons !

    (Fin de l'épisode...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

  • La rencontre (PART IV)

    Un cri aigu, certainement féminin, déchire l’étoffe opaque des lieux. Je me retourne, mon regard cherche à déterminer sa provenance. Rien, rien ne se distingue dans cette obscurité. Seule filtre une respiration haletante qui se répercute en écho sur les parois et témoigne de la peur qui s’insinue. Je m’avance prudemment, mon pied roule sur quelque chose de cylindrique, difficilement définissable, un genre de tuyau, tout à la fois flasque au contact et ferme en profondeur. Je le sens se tortiller sous ma semelle, ram… ramper. C’est une matière vivante ! Tel un warning, l’image d’un serpent clignote dans mon esprit et, à mon tour, je pousse un cri d’effroi en dégageant mon pied. Mon corps frémit, quelques gouttes froides de sueur perlent sur mon front et dégoulinent le long de mon visage. Je n’ose m’avancer davantage.

    Tout près, face à moi, le souffle par à-coups brefs s’amplifie. Enfermé dans cette pièce avec moi, je n’ai pas réussi à définir l’Autre, à le conceptualiser, à l’imaginer. Est-ce une personne, patiente ou infirmière et dans quel camp se situe-t-elle, amie ou ennemie ? Ou est-ce plutôt un animal, amical ou agressif, dominateur ou dominé ? A moins qu’il ne s’agisse d’une créature tout droit sortie de nulle part, divine ou maline, rêve ou cauchemar ?

    Je me perds dans ces considérations, mes sens flageolent, la panique tétanise mon corps. La peur s’empare de moi, monte progressivement comme le niveau de l’eau dans les cales d’un navire qui s’échoue, de mon sexe roide vers la raison amollie, la peur de l’inconnue, la peur mutuelle de l’autre. Nous nous épions dans le noir, à l’écoute du moindre bruit trahissant le geste, la tentative qui va faire basculer définitivement la situation dans un sens ou dans l’autre.

    Mes doigts tâtent lentement le mur à la recherche de l’interrupteur. Il y a d’abord le déclic du levier qui résonne définitivement dans le silence soudain de la pièce, puis la lumière et les yeux qui clignent et enfin la réponse visuelle. Le soulagement d’un côté, la reddition de l’autre.

    Dans le coin, recroquevillée sur elle-même, dans une forme d’abandon total, la tête baissée, le visage enfoui dans les genoux, les bras recouvrant, telle une carapace, les jambes rabattues contre la poitrine, elle se livre vaincue. Je reconnais immédiatement le duvet brun des avant-bras, l’effluve musqué de son épiderme effrayé, la chaînette qui ceint son poignet. Vass ! Machinalement, mes doigts entrechoquent les perles d’un bracelet en lanières cuir tressées qui gît inexplicablement dans le fond de la poche de mon pantalon.

    Je m’approche, elle relève lentement la tête. De longues mèches lisses noires s’ouvrent telle un rideau de théâtre et laissent apparaître son visage. De grands yeux bruns embués interrogent, des traces humides serpentent entre les grains de beauté qui maculent son minois. Ressemblance troublante qui mène à la confusion des sens.

    - Ne me faites pas de mal !

    - Pourquoi vous ferais-je du mal ?

    - Vous êtes une personne dangereuse, je le sais. Une personne incontrôlable.

    - Alors pourquoi m’avez-vous délivré ?

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

  • La rencontre (PART III)

    Un bruit métallique me fait sursauter. Là, au beau milieu de la pièce, une clé rebondit sur le sol à la manière d’un galet lancé sur la surface de la mer. Sans réfléchir, d’un bond je m’en empare et déjà je crochète la serrure qui finit par céder. Je tire énergiquement la porte. Des bruits de pas précipités résonnent dans le couloir. A peine ai-je le temps d’apercevoir la personne qui détale à grandes enjambées. Elle vient de tourner à l’angle du couloir. Instinctivement, je me mets à la courser. Je ne saisis pas la situation, mais j’ai la conviction que je dois la rattraper. Je ne suis pas dans mon état normal : un mélange d’excitation et de peur me serrent le cœur.

    Je cours à fond sans me soucier de la direction à prendre. Les couloirs sont longs et rectilignes. Ils sont entrecoupés à angle droit d’autres couloirs, véritable quadrillage d’une feuille de cahier d’écolier. Les portes des chambres défilent à cent à l’heure. J’entends de temps à autres des grognements ou de légères plaintes. A chaque intersection, je marque une hésitation qui me fait perdre un temps précieux et du terrain. Bientôt, je serai complètement distancé. Elle court vite, trop vite pour moi. Je m’affaiblis, je ne respire plus, je m’asphyxie. Je me perds.

    Il m’a semblé apercevoir son ombre au tournant à gauche. Le couloir est désespérément désert. Je m’arrête pour souffler et tends une oreille captive du moindre indice sonore : pas un bruit de pas, un silence oppressant, tout juste troublé par le grésillement stressant d’un néon défectueux diffusant une lumière blanchâtre stroboscopique.

    Je m’égare dans une infinitude de couloirs, à la dérive. Ils sont particulièrement laids. Le sol est peint en gris et les murs d’un dégradé de couleurs toutes plus moches les unes que les autres. Les teintes semblent varier par bloc. Elles vont du vert tisane au mauve ecclésiastique, en passant par toutes les nuances bleuâtres et rougeâtres. Je n’en connais pas la signification. Je viens du secteur vert et je suis maintenant dans le secteur rouge…

    Des voix, des pas, oui ce sont bien des voix et des pas. Figé en plein milieu d’un couloir démesurément long, je dois fuir. Ils ne vont pas tarder à apparaître au coin. Les pas se rapprochent. Pas le temps de courir jusqu’à l’autre extrémité. Je suis coincé. Je presse la poignée de la première porte qui se présente à moi. Pas de résistance, la porte s’entrouvre sur une pièce plongée dans la pénombre. Le contour du mobilier se distingue à peine. Pas le choix, j’entre et referme la porte derrière moi.

    Les voix se font plus audibles. Elles parlent d’une chambre, 212, je crois, qui a été découverte ouverte. Le patient s’est échappé. Il erre dans la clinique. Il faut le retrouver au plus vite car il n’a pas d’existence légale. Je retiens mon souffle, les voix passent, le silence reprend ses droits. Je décolle mon oreille de la porte et recule légèrement. Un cri surgit derrière mon dos.

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

  • La rencontre (PART II)

    Le temps se distend indéfiniment en sa compagnie. Nulle unité de mesure ne semble encore faire foi. Un à un je détaille les nombreux grains de beauté qui l’embellissent et entreprends de les recenser : 1 sur la joue droite, 1 sur la narine, 1 au-dessus de la lèvre supérieure, 1 sur le menton, 1 à l’extrémité du nez, 1 sur la mâchoire gauche, 2 sur l’épaule droite, 1 sur l’avant bras, 1 sous l’aisselle gauche, 1 sur le bras intérieur, 1 sur le majeur, plusieurs en grappe sous le cou, 1 à la naissance du sein gauche, 1 centré proche de la poitrine, 1 entre les seins… Soudainement elle se lève.

    Le temps est à se quitter, pourtant ses lèvres continuent à remuer, à s’agiter tout en se rapprochant de mon visage. Des lèvres fines au dessin minutieux luisent d’un brillant peint au pinceau. Le désirable arrondi de sa lèvre inférieure se tend dangereusement vers moi pour m’embrasser, véritable invitation à y déposer mon empreinte. Je me reprends au dernier moment et la bise sur la joue. Elle me lance un dernier sourire, avenant, rayonnant, transcendant.

    Ca y est, c’est fini, elle est partie. Je reste là, assis à la table, abasourdi. Un indescriptible parfum de bonheur embaume la salle. Cette fille est féerique. Je ne sais qui elle est, je n’ai pas écouté le moindre de ses mots. A bientôt M. Raspankov, m’a-t-elle glissé. Oui, à bientôt mademoiselle… Mademoiselle… ? Mon pied bute sur quelque chose. Je regarde sous la table et saisis un bracelet en lanières de cuir tressées orné de quelques perles violettes transparentes. Sur la petite plaque son prénom est gravé. A très bientôt Mademoiselle Vassilia. J’enfouis mon trophée dans la poche de mon pantalon.

    *

    J’observe l’écuelle qui gît au milieu de la pièce. Il s’en échappe un fumet peu ragoûtant. Allait-on toujours me servir cette infâme pâtée ? Je les soupçonne d’y adjoindre, à mon insu, quelques médicaments anesthésiants. Je souris béatement, ils ne peuvent rien contre moi, je suis déjà loin, oh oui, bien trop loin… Soudainement une idée me traverse l’esprit à la vitesse d’une comète. Frénétiquement je fouille dans la poche de mon pantalon. J’en extrais une gourmette. Je lis avidement le prénom inscrit.

    De dépit, je shoote violemment dans la gamelle. Puis me laisse choir lentement sur les fesses contre le mur. La gamelle a explosé contre le mur. De longs filets de nourriture gluante dégoulinent le long du mur. Je pense à ce moment là que ma cervelle doit être à peu près dans le même état. Ma main se crispe sur la gourmette de Vass comme dans un dernier soupir.

    *

    Je reçois peu de visites, probablement la conséquence de mon acte sur l’infirmière, elles sont essentiellement hygiéniques. Sous bonne escorte, je suis accompagné pour me faire toiletter. Nous parcourons alors de longs et larges couloirs qui s’entrecoupent avec d’autres longs et larges couloirs ; nous prenons un ascenseur qui monte, puis un autre qui descend ; nous franchissons plusieurs halls d’affilé, puis nous gravissons les quelques marches en colimaçon d’un escalier. Je n’ai aucune notion du temps que prend ce trajet, ni de la distance parcourue et, bien que l’empruntant très souvent, je suis bien incapable de me repérer, tant le réseau de couloirs est complexe et revêt souvent des allures de labyrinthe.

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

  • La rencontre (PART I)

    La porte s’entrouvre. Elle apparaît dans un éclat de lumière. Sa silhouette se découpe troublante dans le contre-jour de l’embrasure. Elle s’immobilise, scrute le fond de la salle du café, fixe son regard, hésite, puis lance un grand sourire. D’une démarche déterminée, elle se pointe. Je la distingue mieux désormais, débardeur beige, jean bleu seyant. Un fin téléphone rose dépasse de sa poche. Elle ne se départit pas d’un sourire qui s’intensifie à mesure qu’elle s’approche. La voila, là face à moi.

    - Monsieur Raspankov ?

    Je ne suis pas M. Raspankov, je ne connais pas cette personne. Naturellement ma réponse devrait être : « Non mademoiselle, vous faites erreur, je ne suis pas monsieur Raspankov » mais étrangement, sans raison apparente, je m’entends opiner.

    Elle se penche pour me tendre la main. Un cœur en métal argenté, suspendu à une longue chaîne, plonge dans une gorge généreuse. Je me lève pour la lui serrer. De longs doigts enserrent fermement ma main. Une chaleur diffuse se dégage, une agréable sensation titille mes sens. Sa peau est extraordinairement douce. Je retire prestement ma main. Elle me dit bonjour d’une voix pleine d’aplomb. Je lui présente une chaise et l’invite à prendre place. Elle ne porte pas de soutien-gorge. Nous nous asseyons.

    Elle entame la conversation mais rapidement mon attention s’égare, plus encline à se porter sur sa physionomie avenante que sur son discours. Un serre-tête en plastique noir retient une abondante chevelure noire. De longues mèches lisses suivent sagement l’ovale de son visage et bouclent sur ses épaules dénudées.

    Ses grands yeux marron reflètent toutes les merveilles de l’Orient. D’épais sourcils noirs au dessin précis affermissent l’expressivité de son regard où percent malice et gouaillerie. De minuscules taches de rousseur maculent le bout de son nez droit ainsi que ses pommettes. Une impression de félicité irradie son visage.

    Je l’observe. S’en rend-t-elle compte ? Son débit de paroles s’accélère et parfois ses mots s’entrechoquent, son visage s’anime, ses yeux brûlent d’une multitude de paillettes étincelantes et ses boucles d’oreilles, en forme de gouttes d’eau métalliques, chahutent le long de son cou. Machinalement, ses doigts jouent avec les branches d’une paire de lunettes de soleil noire. Son effronterie juvénile, sa crânerie insouciante me conquièrent,  son joli sourire spontané, franc qui ponctue ses exclamations m’emmène là où nul ne peut me retrouver.

    Le serveur s’approche d’elle pour s’enquérir de sa commande. Il tourne autour d’elle, la plaisante. Deux-trois mots qui la retournent. Elle éclate de rire. Elle place sa main devant la bouche comme pour l’étouffer. Elle porte les ongles longs et manucurés de vernis blanc tendance french tip. Trois veines se dessinent sur le front et convergent vers la naissance du nez.

    Le garçon de café rajoute deux autres mots. Elle rit, beaucoup, trop ? Je remarque le caractère familier des mots échangés, se sont-ils déjà croisés ? Soudainement elle lui tire la langue. Une langue pointue qui me fait frémir. J’ai toujours préféré les pointues aux arrondies. J’ai ma réponse, ils se connaissent très bien. Elle me le confirme, en s’excusant auprès de moi. C’est le frère d’une amie. Mais déjà je ne l’entends plus, à nouveau parti dans ma rêvasserie…

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

     

  • Les méandres du temps 2

    Toujours en vacances. Si elles se passent bien ? Oui, oui ! Un soleil de plomb, 40 degrés à l’ombre, l’immensité à perte de vue. Bon, toute ressemblance avec la réalité serait purement fortuite.

    Alors quoi cette semaine, quoi se mettre sous la dent ? Je vous propose donc, dans  ces « méandres du temps bis », un texte que j’ai écrit il y a quelques temps, dans un style différent de mes dernières nouvelles, histoire de varier les plaisirs. Il s’intitule : « Ces notes de piano »

    Clique ici pour lire « Ces notes de piano »

     

    Sinon, si vous avez un absolument grand besoin de lecture immédiat, je suis en train de lire un roman de Tobias Wolff ou plus exactement une série de nouvelles. Le titre du livre est : La nuit en question.

    Pour en savoir plus sur ce livre, clique ici.

     

    Enfin, je voudrais vous parler d’une jeune femme, askelia, que j’ai découverte il y a très peu de temps. Son écriture m’a littéralement conquis. Des textes extrêmement courts qui expriment énormément. Un coup de cœur littéraire.

    Cliquez ici pour découvrir les textes d’askelia.

    Allez, déjà on m’attend. Les vacances ne sont pas toujours très reposantes. A très bientôt. Retour à la nouvelle le lundi 5 mai. D’ici là, je reviendrai certainement dans un prochain « méandres du temps »

    MonsterJack

  • Les méandres du temps

      Voilà comment on se laisse prendre dans les méandres du temps ou plus exactement dans la problématique du calendrier.

      Fallait-il mettre en ligne la première partie du troisième épisode de Station-service, alors que la semaine prochaine je vais m’absenter une quinzaine de jours ?

    Le publier puis laisser en suspens l’histoire un très long moment ou attendre mon retour de congés ?

      Je pense que cela n’aurait pas été raisonnable de le mettre sur le blog. Ne me serais-je pas attiré encore plus vos foudres, chers lectrices et lecteurs ?

      D’ailleurs je profite de ce billet pour vous remercier, vous qui me lisez avec assiduité, qui me laissez vos impressions sous forme de commentaires ou d’emails. Et même si je n’y réponds pas toujours (souvent ?), faute de temps, sachez qu’elles sont mon moteur de création et essentielles dans ma motivation car, comme vous le savez, vous qui écrivez aussi, l’écriture est parfois difficile à accoucher.

      Pour en revenir à mon propos, évidemment j’ai découvert cette subtilité de calendrier qu’au dernier moment et, de ce fait, je ne l’ai anticipée !

    Donc, hier soir, tardivement, je me suis replongé dans mes anciens textes déjà blogués, il y a longtemps.

      Cette semaine, je vous propose de (re)découvrir une autre facette de mon écriture par le biais d’un poème. Oui d’un poème, mais à la sauce MonsterJack bien sûr ! Il s’intitule « One-Shot ».

     

    Cliquez ici pour lire One-Shot 

     

    Et si vous avez encore faim de lecture, je vous propose deux coups de coeur :

     

    Tout d’abord la lecture d’un livre que j’ai particulièrement aimé qui s’intitule : « Tout le monde s’en va » de l’écrivain cubaine Wendy Guerra. C’est un roman sous la forme d’un journal tenu par son héroïne Nieve pendant son enfance puis durant son adolescence dans le Cuba des années 1980. C’est touchant, poignant, admirablement bien écrit. Aucune facette de Cuba n’est laissée dans l’ombre.

     

    Cliquez ici pour avoir plus d’information sur le livre de Wendy Guerra.

     

      Enfin, je vous conseille aussi de vous évader du côté de mon amie Soleil de Brousse au talent narratif incomparable.  Cela faisait longtemps que je voulais vous le suggérer, voilà qui est fait !

     

    Cliquez ici pour lire le blog de Soleil de Brousse

     

     On se retrouve pour le prochain épisode de la série, le lundi 5 mai 2008.

     

      D’ici là, je reviendrais en de petites chroniques vous (re)présenter quelques-uns de mes anciens textes, ou vous livrer mes coups de cœurs.

     

    Amicalement,

    MonsterJack

     

  • Au chat et à la souris (PART IV et fin de l'épisode)

      Ce matin, ses pas ne résonnent pas de la même façon, ils sont plus saccadés. Ce ne sont pas ceux coutumiers de mon infirmière. Elle doit être beaucoup plus jeune. Elle manque probablement d’expérience, peut-être est-ce sa première mission. Je dois m’imposer d’emblée, me faire respecter, édicter ma loi. Il faut qu’elle sache qu’on ne peut l’enfreindre délibérément, qu’elle comprenne qu’on n’entre pas impunément dans mon antre.

      Trop insouciante, ne l’a-t-on prévenue ? Un instant, je reste interloqué à la vision de ce bras qui, interminablement, affleure le sol, tergiverse, hésite à lancer l’écuelle. Une victoire aussi facile ne peut me satisfaire. Puis, gagné par une émotion naissante, je succombe, sourd à de vaines résistances, au charme de cette peau mate piquée de quelques pépites de beauté, à la délicatesse de ces longs doigts déliés de violoniste, à la ciselure féminine de ses biceps.

      Je m’agenouille et saisis son poignet ténu. Instantanément un tressaillement accompagné d’un petit cri de stupeur parcourt son bras. Elle ne se débat pas, ne cherche pas à desserrer l’étreinte. Son bras se fige, se rigidifie, son pouls s’accélère, semble cahoter à mesure que la peur l’assaille. Mes lèvres s’égarent émues sur le duvet brun de l’avant-bras, épanchent leur trouble au contact de sa douce peau ; mon nez hume l’effluve musqué de son épiderme.

      Machinalement mon pouce joue avec le métal d’un bracelet. Je relâche le poignet. Immédiatement le bras disparaît laissant une gourmette chue au sol. Je l’apostrophe, mais le bras ne réapparaît. Déjà je l’entends détaler dans le couloir. Je ramasse la chaînette, découvre son prénom gravé : « Vass ».  J’hésite, je ne sais qu’en faire, finalement je la glisse dans la poche de mon pantalon.

      Je pressens l’ombre d’une menace roder. D’un clic je place la gourmette dans mon panier d’objets. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai l’intuition qu’elle pourra resservir. L’orage tonne de plus belle, de grosses gouttes de pluie s’abattent sur les vitres. Une déflagration tombe à quelques mètres de là, la lumière vacille, l’écran s’obscurcit soudainement, puis la pénombre s’installe autour de moi.

    *

      FIN PROVISOIRE D’AUTOROUTE DANS 5 KM. Le panneau luisant dans le faisceau lumineux de mes phares surgit brusquement. Bon Dieu ! Ce n’est pas ce qu’indique le GPS. La pluie redouble d’intensité. J’aimerais bien m’arrêter à une station-service ; je suis au bout du rouleau. A l’horizon, je crois discerner une enseigne lumineuse du haut d’un pylône.

    (Fin de l'épisode...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

     

  • Au chat et à la souris (PART III)

      Je ne reçois plus guère de soins.  Je suis classé comme patient extrêmement dangereux. Une fois par jour la trappe située en bas de la porte de ma cellule s’entrouvre. Brièvement un bras point et fait glisser sur le sol une écuelle de nourriture jusqu’au milieu de la pièce. Je le reconnais, c’est souvent le même, velu, dodu, bestial mais malgré tout féminin.

      J’entends ses pas résonner dans le couloir, se rapprocher de la porte. Sciemment elle alourdit sa démarche, en accentue le bruit, pour me signaler qu’elle arrive, pour me prévenir de me tenir prêt, qu’il serait dommage que je sois assoupi, afin que le jeu puisse se dérouler dans les règles de l’art, à égalité de chances car c’est un moment de la journée très attendu.

      Je me poste près de la porte et guette l’apparition de son bras. De l’autre côté,  elle se méfie. C’est à qui sera le plus vif ! Elle a le privilège d’engager la partie. J’entends sa respiration forcir, puis se bloquer au moment crucial où elle s’apprête à jeter son bras dans l’arène. J’affectionne ce moment bref qui précède l’agissement où chacun, de part et d’autre de la paroi, retient son souffle, épie le moindre bruit indicateur. J’aime entendre le tambourinement du cœur s’emballer dans la poitrine, la gorge se resserrer, l’adrénaline s’emparer du corps. A peine le bras jaillit-il que mon pied tente d’écraser sa main.

      La partie se déroule toujours en deux phases. La seconde, la revanche, quand elle fait rouler la bouteille d’eau, est plus tactique ; deux choix s’offrent à elle : renvoyer immédiatement la bouteille et profiter d’un effet de surprise ou observer un temps d’attente plus ou moins long et se retrouver dans la situation précédente, lors du premier jet. C’est une question de stratégie dont elle a la maîtrise ou la main.

      Je gagne rarement face à cette joueuse aguerrie. Je suis persuadé qu’ils m’envoient la championne du monde de la clinique, la plus expérimentée, la plus habile. Elle a l’avantage de s’entraîner beaucoup plus que moi avec le grand nombre de patients à servir.

      En de rares moments d’égarements, je parviens à tromper sa vigilance. Je remporte la partie et nous sommes deux à hurler d’un même cri : elle de douleur et moi de joie. Mon talon, telle une masse tombe lourdement sur sa main et la tue sur le coup comme on écrase une araignée se défilant sur le sol, puis j’aplatis consciencieusement ses doigts en m’essuyant méticuleusement les pieds. En général dans ces cas là, le jeu s’interrompt et quelques minutes plus tard j’ai droit à l'intervention de la brigade piqûre.

      Ce matin, ses pas ne résonnent pas de la même façon…

     

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.

  • Au chat et à la souris (PART II)

    Sa tête couverte d’une ridicule coiffe se penche sur moi et, soudainement, une terrifiante poitrine, comprimée dans l’échancrure d’une blouse trop étroite, obscurcit mon champ de vision.

     

      Sous la pression, le bouton cède et déverse un flot de chair difforme qui se balance et s’entrechoque dangereusement au-dessus de mes yeux. Le ballottement perd de l’ampleur et finit par se figer dans un précaire équilibre. Je regarde avec inquiétude les deux énormes seins en forme d’obus suspendre leur survol de reconnaissance et s’avachir brutalement contre mon visage, à gorge déployée.

      De rage, je la mords à mort. Sauvagement, mes dents carnassières saisissent leur proie, s’acharnent sur elle, ne la lâchent pas. Elles s’enfoncent profondément dans la matière flasque, la lacèrent, l’arrachent par lambeaux, déchiquettent la chair sanguinolente, recrachent un bout de téton caoutchouteux et peu comestible. L’infirmière beugle, comme jamais un humain n’a encore hurlé.

        Je me complais dans la plus complète inactivité et la plus grande solitude. Mes journées s’étirent interminablement dans ce huis clos avec moi-même. Je n’ai rien à faire, je n’ai rien à penser, juste à entretenir mon corps pour qu’il ne défaille, à occuper mon esprit pour qu’il ne déraille. La pièce doit mesurer tout au plus dix mètres carrés ; pas facile de se dépenser physiquement et de s’évader intellectuellement dans ces conditions.

      Pour conserver la forme, je cours dans la pièce, je longe les murs, à petites foulées ou sautillements, des heures entières. Cette activité m’aide à survivre, à sentir mon cœur battre, mon souffle souffrir. J’alterne les courses, dans le sens des aiguilles d’une montre ou l’inverse. Je fais des étirements, des pompes, des assouplissements, parfois même des figures acrobatiques. C’est le seul moyen que j’ai pour entretenir mon corps.

      Quand à mon esprit, il est bien incapable de penser quoi que ce soit. Trop d’interrogations demeurent. Je ne connais  toujours pas la raison de mon placement. La rumeur affirme que j’ai butté une fille. Butté ? Oui, une belle gosse ! Une belle gosse ? Oui, une serveuse de cafétéria.*

      Au plus profond de mes souvenirs, je ne parviens pas à visualiser la scène. Les images qui défilent dans ma mémoire restent désespérément opaques, seule subsiste la bande son. Cela commence toujours par la cacophonie d’une foule agitée, puis une voix cristalline s’élève et prononce une phrase en forme de sentence qui indéfiniment se répète par vagues dans mon esprit : « Butte-la, la belle gosse ! ». L’excitation est à son comble quand brutalement des coups de sifflets stridents surgissent de toute part et se réverbèrent douloureusement dans ma tête.

      Je ne revois pas la fille, son visage, ses lèvres, pourtant je ressens encore son souffle chaud qui me brûle la poitrine. J’entends ses aspirations plaintives. Cela provoque en moi une érection immédiate. Oui, il a dû se passer quelque chose de grave.  Ai-je été jugé pour cet écart ou interné d’office ? Je ne me souviens de rien, et cela m’inquiète.

     

     

    * voir l’épisode précédent « Station-service ».

     

    (A suivre...)

    Jack Monster, © 2008, tous droits réservés.